CGT 41 : pour Sébastien Boulanger, « la mèche peut s’allumer à tout moment »
Après la rentrée de ses syndicats, le 8 septembre dernier à la Bourse du travail de Blois, Sébastien Boulanger, co-secrétaire de l’Union départementale CGT 41 (avec Christine Bariaud) a bien voulu répondre à nos questions dans un contexte social, post réforme des retraites et inflationniste, hautement inflammable.
Magcentre : Comment se passe la rentrée ?
Sébastien Boulanger : Les salariés subissent l’inflation (4.9 % en août) des produits alimentaires et de l’énergie (+10 % des tarifs réglementés de l’électricité le 1er août) et cela d’autant plus que toutes les entreprises n’ont pas accordé d’augmentation de salaire à hauteur de la hausse des prix dans le cadre des négociations annuelles obligatoires (NAO). Beaucoup se sont contentées de primes. Face à cette situation, seule la mobilisation, en créant un rapport de force, permet d’obtenir satisfaction. Ce fut par exemple le cas chez CDM à Montrichard où les ouvrières ont obtenu 10 % ou chez le transporteur Keolis à Blois. À la suite d’une procédure d’alarme sociale, les salariés ont obtenu une hausse de leur prime de vacances.
Que pensez-vous de la conférence sociale sur les salaires annoncées par Emmanuel Macron le 30 août dernier ?
Nous disons chiche au président. Nous sommes satisfaits qu’il reconnaisse que sa demande au patronat du mois de mars de revaloriser les minima de branches a été très largement ignorée et qu’il mette enfin sur la table la question des salaires. Cependant, alors que le pouvoir d’achat des salariés continue d’être rogné par la hausse des prix, la tenue de cette conférence ne saurait se limiter aux carrières et aux branches sous le salaire minimum comme semblent l’annoncer les proches du président, ni au seul secteur privé.
Quelles sont vos demandes ?
Pour la CGT, la conférence sociale doit permettre : d’augmenter le montant du SMIC à 2.000 € brut, d’indexer les salaires sur les prix, d’augmenter de manière automatique les minima de branches dès que le SMIC est revalorisé, suivi d’une ouverture immédiate de négociations salariales dans l’ensemble des branches, de supprimer les exonérations sociales aux entreprises qui favorisent les bas salaires et la précarité (temps partiels, CDD) et de conditionner les aides publiques à un avis conforme du Comité Social et Economique (CSE), en matière de salaire, emploi et environnement.
Après le succès des manifestations contre la réforme des retraites (200 000 personnes dans la rue en Loir-et-Cher lors des treize défilés), prévoyez-vous un autre rendez-vous ?
Oui, une journée de mobilisation et de grève est prévue le 13 octobre prochain à l’appel de l’Intersyndicale de huit organisations et de la Confédération européenne des syndicats (CES). Nous manifesterons contre l’austérité, pour une hausse des salaires, une amélioration de la protection sociale et des services publics. Je peux vous dire que la colère suite à la réforme autoritaire des retraites n’est pas retombée et se cumule avec celle contre la hausse des prix alimentaires et de l’énergie. La situation est instable. Les classes moyennes sont touchées et la précarité explose comme le constatent les associations caritatives. S’y ajoute le projet d’une nouvelle réforme de l’assurance-chômage. En Loir-et-Cher, avec nos partenaires, nous définirons les modalités d’action. Il ne faut pas céder au fatalisme et à la résignation.
Que pensez-vous de la proposition de Fabien Roussel, secrétaire du Parti communiste, d’inviter les Français à se rassembler devant les préfectures pour « aller réveiller les services de l’État, les envahir même si nécessaire » ?
Ces propositions n’engagent que son auteur. À la CGT, nous préférons des actions revendicatives et construites dans le temps. Le populisme n’est jamais la solution. C’est d’ailleurs pourquoi nous combattons fermement le Rassemblement National et ses valeurs d’exclusion. Chacun sait par exemple que nous avons besoin de travailleurs étrangers pour pallier le manque de main d’œuvre.
Nous ne pensons pas que le blocage des prix soit la meilleure solution. Les hausses de salaires dans les entreprises et du point d’indice pour les fonctionnaires sont de meilleurs leviers qui en outre font rentrer des cotisations sociales. On sait très bien que bloquer les prix revient à pénaliser les producteurs et les salariés. Pour l’essence, c’est faire payer le contribuable.
La CGT est désormais dirigée par une femme, Sophie Binet. Comment se porte votre syndicat ?
Les choses bougent positivement. Nous sommes toujours dans une dynamique unitaire. Localement, nos effectifs ont progressé de 8 à 10 % suite à la réforme de la retraite à 64 ans imposée contre le peuple et 80 % des Français. Dans les entreprises, de nouvelles sections CGT ont vu le jour à l’image de Keolis ou Centrair à Montrichard. Plusieurs journées d’action sont programmées : Journée internationale pour la paix le jeudi 21 septembre (place de la Résistance à Blois, 17 h 30) et contre les violences policières et syndicales (place Lorjou à Blois, 10 h 30). Il faut savoir que 1 000 représentants syndicaux sont actuellement poursuivis ou ont été injustement licenciés. Le 28 septembre, nous nous mobiliserons enfin dans le cadre de la Journée internationale pour le droit à l’avortement avec d’autres organisations syndicales et associations de femmes. Les combats sociétaux comme l’égalité femmes-hommes sont plus que jamais au cœur de l’action de la CGT, le syndicat français le plus représentatif.
Propos recueillis par Jean-Luc Vezon